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31/12/2014

Voeux 2015 ! (4) Que les Français s'ouvrent (un peu ?) à la politique internationale...

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...et prennent conscience de la vassalité américaine dangereuse à laquelle Nicolas Sarkozy a réduit la France :


 

1. Rideau sur l'Afghanistan

Nous entendions ce matin (France Info) le général français Philippe Lavigne, ex-chef de  l'aéroport militaire de Kaboul, commenter la fin de "l'opération Pamir" : treize ans de présence de l'armée française sous commandement américain, dans une guerre d'occupation qui aura coûté à la France 89 morts et plus de 700 blessés – pour un résultat néant, comme dans toutes les guerres exotiques de Washington. Les taliban se disent prêts à faire à l'armée afghane le sort que fit Daech à l'armée irakienne (elle aussi ''formée'' et armée* par le Pentagone) ; après quoi le pays retombera dans sa guerre civile permanente. 

Qu'ont fait les soldats français sous commandement US ? Ils se sont battus, comme ils savent le faire. Ils ne sont pour rien dans l'échec** de cette occupation américaine d'un pays hostile.

Mais pour quoi se sont-ils battus ? "Pour les valeurs  françaises", disait le général Lavigne ce matin. Quelles valeurs ? "La liberté", avançait-il... En quoi la liberté est-elle une valeur spécifiquement française ? Tous les pays s'en réclament, quitte à lui donner des sens variables selon les cultures !

Evidemment le général ne pouvait dire la vérité, que voici. En 2003, lorsque Washington a transformé l'opération Kaboul d'octobre 2001 en occupation déraisonnable de tout l'Afghanistan, Paris aurait dû retirer ses forces. Il a choisi de les laisser sur place, et sous commandement US. Etait-ce pour se faire pardonner le baroud d'honneur de Villepin à l'ONU contre la guerre d'Irak (février 2003) ? Cette combinaison allait nous coûter cher : 4 milliards d'euros dépensés en Afghanistan.

Paris était entré dans la voie de la sujétion américaine dès 1995, quand M. Juppé demanda à Washington de réadmettre la France dans le commandement intégré de l'OTAN : situation dont Charles de Gaulle nous avait libérés en mars 1966. La suite était prévisible  avec ses fausses promesses : en septembre 2007, l'hyper-atlantiste Hervé Morin (ministre de Sarkozy) proclamait que le retour de la France dans l'OTAN allait permettre une « Europe de la défense »... Ce retour dans l'OTAN eut lieu en 2009. En 2012, l'intervention française au Mali –  initiative qui se réclamait  pourtant de  la "communauté" euro-atlantique – n'a suscité que la méfiance du reste de l'Europe et l'agacement*** de Washington ! Après avoir vendu sa liberté politico-militaire contre une illusion d'amitié américaine (et de carrières OTAN pour ses généraux), la France s'est tout de même retrouvée seule à la guerre : aussi seule que si elle n'avait pas réintégré le "commandement intégré" ; aussi seule que si l'UE n'existait pas.

Cette preuve aurait dû ouvrir les yeux des Français. Mais si l'on en croit les sondages, ils continuent à classer la politique internationale comme le cadet de leurs soucis.

 

2. La ''nouvelle guerre froide''

Si la politique internationale ennuie le Français, ce n'est pourtant pas faute de la voir à jet continu sur les écrans de télévision ! Enfin, pas vraiment la politique internationale mais son imagerie : celle des Méchants Menaçant Nos Valeurs (lesquelles sont "la liberté", comme on sait, ainsi que "la tolérance" et "les avancées sociétales").

Ces bad guys sont désignés par Washington. Actuellement il y en a deux : le Méchant Jihadiste et le Très Méchant Tsar. Nos médias parlent beaucoup mais avec circonspection du Méchant Jihadiste (sachant d'où viennent ses armes : de l'armée irakienne formée par les Américains, et des arsenaux de Kadhafi abattu par Sarkozy ; c'est gênant).

On est plus à l'aise pour taper jour et nuit sur le Très Méchant Tsar. Pourquoi jour et nuit ? Parce que c'est "la nouvelle guerre froide". Qui l'a déclarée ? Le Très Méchant Tsar, point final. Telle est la version médiatique de la crise "euro-russe".

Mais cette crise est nettement plus complexe ! ici nous avons souvent fait écho aux vrais spécialistes de l'Europe de l'Est et de la Russie post-soviétique : ils appellent les Français à comprendre que la tension a été fabriquée par la Maison Blanche, sur fond de guerre économique et surtout énergétique (le gaz de schiste). Le scénario US se développe sur deux plans : 1. resserrer l'emprise américaine sur l'Europe, en lui interdisant de commercer avec la Russie ; 2. susciter une catastrophe économique en Russie, pour provoquer la chute de Poutine et son remplacement par un good guy genre Eltsine. 

Le détonateur a été l'affaire ukrainienne. La prise en main du pays par les intérêts américains a été montée par Victoria Nuland, sous-secrétaire d'Etat US pour l'Europe et l'Eurasie, et s'est traduite par la venue au pouvoir d'Arsenyi Iatseniouk. Le nouveau pouvoir menaçait directement la base navale russe de Sébastopol. D'où l'inévitable coup de force de Poutine sur la Crimée, suivi du chaos dans le Donbass ; événements dont Washington se sert maintenant – via l'OTAN – pour seriner aux Européens que Poutine veut les envahir et qu'il faut lui faire "une nouvelle guerre froide".

 L'Ukraine possède de grandes réserves de gaz de schiste, sur lesquelles les pétrogaziers US (Chevron) sont en train de mettre la main : le fils du vice-président américain Joe Biden est désormais administrateur du principal groupe gazier ukrainien. L'Ukraine agricole est en voie de colonisation par l'industrie agro-alimentaire US : Cargill, Monsanto, John Deere. Depuis le 2 décembre, une Américaine est carrément ministre des Finances à Kiev... Pendant ce temps, le Congrès américain vote des motions incendiaires appelant au conflit avec la Russie et enjoignant à l'Europe de s'y joindre ; des experts européens proches de l'OTAN commencent à parler d'un "danger militaire russe" ; les dirigeants polonais et baltes "demandent au Pentagone" de nouvelles bases de l'OTAN sur leur territoire. Nos braves militaires parisiens regardent tout ça sans bien voir d'où vient le coup – et s'apprêtent sans doute à nous reparler des "valeurs françaises" ("la liberté") menacée par un bad guy, etc... Dans quoi nous entraîne-t-on ? C'est un engrenage redoutable.

L'engrenage est dénoncé librement aux Etats-Unis par des voix non-conformistes, comme celle de Ron Paul (ultralibéral en économie mais lucide en géopolitique).

Il est dissimulé aux Français par une machinerie médiatique acquise aux vues de Washington !

C'est pourquoi notre quatrième voeu pour 2015 est celui-ci : que les Français s'ouvrent à la politique internationale ; qu'ils redécouvrent que la liberté est moins dangereuse que la vassalité.

 

 _______________

* Armement tombé sans combat aux mains de Daech lors de la chute de Mossoul.

** Notre blog le disait depuis 2002 : ce qui nous avait valu, à l'époque, des discussions difficiles avec certains de nos lecteurs officiers – qui n'admettaient pas que des civils doutent du bien-fondé d'une guerre.

*** Et même l'hostilité grossière de l'ambassadrice d'Obama à l'ONU : "L'intervention française, c'est de la merde !"  (sic).

 

 

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